Location saisonnière : fin de partie ?

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Publié par Wizi le 14/01/2022, modifié le 29/07/2022.

Le boom de la location saisonnière n’en finit pas de crisper les relations entre élus et plateformes de location, résidents permanents et touristes de passage, habitants locaux et investisseurs extérieurs.

Il est vrai que la tentation de s’investir dans le logement saisonnier plutôt que celui de longue durée est forte, tant la rentabilité de cette formule semble prometteuse. Mais les conséquences de cette ruée sont de plus en plus visibles et les réactions de plus en plus radicales, à tel point que l’on peut s’interroger sur la pérennité de cette évolution (révolution ?).

Car les arbres ne montent pas jusqu‘au ciel !

Une rentabilité surestimée ?

Si l’offre de location saisonnière a mis quelques années pour se déployer au-delà des traditionnels gites et chambres d’hôtes, grâce à l’émergence de plateformes telle que Airbnb, elle devient tellement abondante que de nombreux « hôtes » dont le bien n’est pas si « exceptionnel » ou pas si bien situé peinent maintenant à attirer leurs clients. Ils en viennent donc à devoir « batailler » (et/ou payer) pour apparaitre en tête de liste sur certaines plateformes de réservation, multidiffuser leur annonce sur plusieurs sites. Car, à la différence de la recherche de locataire en location longue durée, la recherche de clients en location saisonnière est … permanente.

Mettre à jour en temps réel ses tarifs, disponibilités, photos et contenus des annonces sur l’ensemble des plateformes de réservation (Expedia, Booking, Airbnb, Hotels.com, …), gérer les doubles réservations (surréservations), synchroniser les arrivées avec le ménage récurrent des lieux, et tout ceci de manière répétitive est une activité si chronophage qu’il a fait émerger une nouvelle activité : le «service manager ». Difficile donc pour beaucoup de propriétaires de se passer d’un logiciel ou d’une plateforme qui gérera pour eux cette complexité, avec bien sûr un coût associé de quelques dizaines à quelques centaines d’euros par mois.

Mais l’optimisation du taux d’occupation du bien, afin de concrétiser les promesses de rentabilité de ses premières estimations, n’est pas la seule préoccupation de l’hôte. Les changements réguliers d’occupants induisent également une répétitivité de la préparation du bien, de l’installation et de l’accompagnement des clients : checkin, checkout, ménage, blanchisserie, … Comment alors, pour bien des propriétaires, se passer également des services d’un prestataire, d’une conciergerie qui peut leur coûter jusqu’à plusieurs centaines d’euros par mois.

La location saisonnière est donc une activité qui se professionnalise. Avant de se lancer, outre les calculs de rentabilité souvent optimistes basés sur le nombre de nuitées attendues, les futurs loueurs saisonniers devront donc intégrer une situation bien éloignée de celle des origines sous peine de se retrouver face à une rentabilité décevante et un niveau de préoccupations bien éloigné de la vision idyllique initiale.

Des impacts dévastateurs

Villes hôtel, villes musée, vacarme des valises à roulettes sur les pavés de la vieille ville, noria de résidents d’un jour, ménage permanent, disparition des commerces et services désormais non rentables avec une population de passage, la liste des griefs portés à l’encontre du développement de la location saisonnière n’en finit pas de s’allonger.

Mais il est une autre conséquence qui défigure complètement le paysage des lieux de vie habituels : la location saisonnière est en train de bousculer l’équilibre fragile entre l’offre et la demande de logements longue durée, celui qui permet aux habitants locaux de vivre sur place. Le nombre de logements loués qui basculent en location de courte durée s’envole, au point que l’activité économique de nombreux lieux en est perturbée. Les résidents locaux ne peuvent plus se loger face à la pénurie de biens et à l’envolée des prix de location de ceux restés disponibles.

Au-delà de l’activité commerciale qui doit s’adapter à ce public de passage, c’est donc l’équilibre économique qui est bouleversé quand nombre d’entreprises peinent à recruter des candidats échaudés par l’impossibilité de se loger.

Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel

Désocialisation, disparition des services et commerces, raréfaction des biens en location longue durée, déstabilisation du tissu économique, il n’en fallait pas tant pour que de plus en plus d’autorités municipales et nationales se mobilisent pour réguler et limiter cette activité.

Enregistrements obligatoires en mairie, limites au changement d’usage de logements, plafonnement du nombre de nuitées, les initiatives se multiplient pour freiner ce mouvement jugé destructeur pour la vie locale. Et si la révolte a été initiée à Paris, ville touristique par excellence, elle se propage maintenant dans les villes touristiques de province où des idées de nouveaux freins émergent : préemption par la municipalité de logements en vente pour éviter leur mutation en location saisonnière, interdiction de changement d’usage pour les locaux commerciaux, statut de résident local, … gageons que la liste va s’étoffer.

Il est donc probable que 2022 verra encore se ralentir ce phénomène de « saisonnalisation » du parc locatif de longue durée afin que les villes restent encore des lieux de vie et non des lieux de passage.

Le choix location de longue durée/location saisonnière est donc toujours d’actualité, mais au moment de s’engager, tout propriétaire doit garder à l’esprit que, si le monde de la location saisonnière est incertain, promis à de futures réglementations restrictives et fortement dépendant du contexte économique (et sanitaire !), celui de la location longue durée est bien plus stable car, si l’on peut aisément se passer de voyages, il faudra bien toujours se loger !

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